lost

I'm lost but I'm not stranded yet

Mardi 2 septembre 2008 à 15:52

On n'en a jamais assez avec l'ironie malsaine de nos jours. En effet, en ces jours de grâce les bus et trams affichent, en plus de leur destination un "Bonne rentrée" sur leur écran lumineux. C'est fort aimable et très drôle. En fait, c'est à peu près aussi rigolo que si on avait écrit "Bon voyage" sur les wagons à bestiaux en partance vers Auschwitz. Cette image, même si elle me fait rire jaune, me semble tout à fait cruelle. J'en viens donc à me demander quelles sont les motivations de ceux qui ont décidé de cet affichage.

La majorité des gens ne supportent pas leur boulot, et quand bien même ils l'apprécient, ils préfèreraient certainement faire autre chose que de passer un temps indéterminé, compressés contre des individus malodorants et laids dans des transports en commun les menant doit à une journée d'épuisement désabusé qui se répètera d'une façon lancinante jusqu'à en pousser certains au suicide ou pire encore, à la mise à zéro.

Qu'entends-je donc par mise à zéro? C'est assez simple.

Prenons un individu normal. Il possède un cheminement personnel, des amis, une famille, des opinions, des envies, des idées.

A force de s'abrutir de travail il stagnera au même point, incapable de mobiliser la volonté nécessaire pour avancer, il fréquentera de moins en moins ses amis et de plus en plus ses collègues, il verra sa famille à des cérémonies qu'il préparera plusieurs mois à l'avance: les mariages, grand sujet de conversation ente adultes en phase de mise à zéro. Ses opinions se calqueront sur ceux de sa profession en général, il sera trop fatigué pour avoir des envies déraisonnables et nivellera vers le bas ses attentes enfin, ses idées se feront moins foisonnantes faute d'exploitation possible et son imagination déclinera. Même son humour sera orienté par ce labeur qui lui permet d'obtenir très légitimement son pain quotidien de la part du seigneur tout puissant, amen.

Mise à zéro

Bienvenue en septembre, mois de désespoir.
Bienvenue en septembre, toi aussi, deviens gris, toi aussi laisse toi faire.
Bienvenue en septembre prépare toi à mourir, camarade
Mais de mort lente*, bien entendu
merci Georges*

Samedi 19 juillet 2008 à 1:31

Devenir un vieux con, décidément c'est une sorte de sacerdoce en ce moment. Entouré par des dizaines de vieux en fin de course, je n'en réalise que mieux les travers dans lesquels chacun sombre de plus en plus, petit à petit avec l'âge. Cette hypocrisie polie et permanente qui fait qu'on finit par ne plus se parler, par tourner à vide, comme des sons dans une vallée se répercutant d'un bord à l'autre et ne faisant que se répéter eux-mêmes.
Toutes ces conversations creuses, exaltant un pénible sentiment de banalité, ces constats plats et décevants sur le monde qui nous entourent, sans la moindre analyse, le moindre but, tous ces échanges de courtoisies écœurantes me donnent un peu plus envie de passer cette planète au napalm chaque jour.

Cela commence dès le matin, on ne dira pas "bonjour" ou "salut", mais plutôt "ça va?". Tristes dialogues de sourds que ceux de ces hommes qui s'échangent un "ça va" chacun, sans attendre la moindre réponse l'un de l'autre. Même la banalité devient galvaudée quand on la simplifie. On enchainera sur un "fait pas beau ce matin" auquel il sera de bon ton de répondre quelque chose à propos de la saison et du fait que ça s'arrangera peut être. De toute façon, la conclusion portera sur la fatalité "il faut bien faire avec" ou un pitoyable "tant que le moral est bon, ça va".

Que se seront dit les deux personnes au cours de cet échange? Rien, absolument rien. Elles ont manifesté leur existence à l'autre et ont prouvé de façon très simpliste leur capacité à regarder par une fenêtre et à analyser ce qu'elles y voient. Leurs réponses l'une à l'autre symbolisent l'acceptation de celui qui est en face, son non-rejet tout du moins. Ce n'est qu'une forme évoluée du reniflage anal de nos amis défécateurs à quatre pattes, rien de plus.

Toute personne ne respectant pas ce type de rituel sera donc considérée comme suspecte, au mieux malpolie, mal lunée, au pire marginale. La menace de la cohésion du groupe inscrite dans nos êtres depuis l'époque des pagnes en tigre à dent de sabre nous conduit à rejeter celui qui ne répond pas aux stimuli de contrôle de sa normalité. Il sera dans l'idéal abandonné sur le bord de la route, éloigné du groupe qu'il risquerait de mettre en danger de par son comportement déviant.
De nos jours bien entendu cela se fait de façon plus subtile. On ne préviendra pas cette personne qu'on va prendre sa pause café, on le laissera finir une tâche ingrate, on fera semblant de l'avoir oublié dans son coin.

Alors pour éviter ça, parce que nous sommes lâches, nous devenons nous aussi des vieux cons. Et un jour on se surprend à ne pas attendre de réponse au "ça va?" que l'on vient de prononcer.

Samedi 17 mai 2008 à 16:43

Le printemps, c'est maintenant certain, est bien installé au-dessus de notre hémisphère, tel le corbeau au-dessus de la fosse que creusaient  ceux qui la rempliraient, quelque part en Allemagne, il y a de cela quelques dizaines d'années, au printemps justement, alors que les petits lapins copulaient avec entrain entre les pâquerettes écrasées à grand renfort de bottes ferrées.

Je disais donc : c'est le printemps, il fait maintenant une température fort propice à la décongélation en extérieur des viandes surgelées, notamment celle des jeunes. Vous savez, ces êtres étranges que l'on croise un peu partout, la mèche en folie, les yeux et le tee-shirt à paillettes brillants et l'air bête. Réchauffés par le soleil qui pointe, ils fleurissent sur les bancs telle la flore bactérienne sur les intestins d'un macchabée bien refroidit, lui.

Il ne fait aucun doute que la majorité des jeunes est une fange sans nom dont je tairai d'ailleurs les adjectifs par respect pour les limites de l'impolitesse que je franchis trop souvent à leur égard. Je ne m'attarderai d'ailleurs pas sur les différentes sous-espèces de cette faune pléthorique et mal aimable qui s'arroge le droit de nous imposer son mauvais goût de façon permanente avec un acharnement qui tiendrait de l'admirable si seulement leur être ne l'était pas lui-même si peu.

Les jeunes sortent donc de chez eux, le slim bien soudé, qui à la moule, qui aux coucougnettes, qu'importe tant que c'est antisexuel. Or, hier, alors que je remontais une côte abrupte, juché sur mon vélo, me déhanchant avec une grâce sans égale dans la position dite de la danseuse, j'aperçus en sens inverse cinq humanoïdes de type mineur selon les lois en vigueur dans notre pays. Leur planche à roulettes sous le bras, les cheveux mi-longs dans le vent, ils baguenaudaient tranquillement, affichant leurs tee-shirts Nirvana et la raie de leur postérieur au-dessus de leur pantalon tombant. Cela ne faisait aucun doute, j'avais en face de moi d'authentiques skateurs, au charme résolument 90's, sans rapport avec ceux qu'on aperçoit désormais dans les skateparks, slimés jusqu'aux ongles, coiffure emo en sus. Face à ces jeunes en (léger) décalage avec leur époque, je me suis senti soudainement regretter cette époque où le monde me semblait moins peuplé d'abjectes hordes aux goûts vestimentaires radicalement au-delà de toute notion de goût et aux hymnes musicaux affligeants de nullité absolue. Soudainement je me suis dit « c'était mieux avant ». Soudainement, je me suis senti devenir un vieux con.

Jeudi 1er mai 2008 à 3:40

Oh, non, ce sujet n'est guère original, je le crains, mais je vous ferai tout de même partager ma vision des choses, notamment parce qu'il faut que je poste pour maintenir ce blog en vie, mais aussi parce que c'est une thématique qui me tient à cœur (si l'on peut dire).

Tout d'abord, il y a l'anonymat.  Si dans de nombreux cas il permet à tout le monde de partir sur un pied d'égalité, il se trouve que c'est là une chose bien illusoire que de croire que cela pourra avoir une réelle influence positive quant à la qualité de la discussion. Simplement parce que nous ne sommes de toute façon pas égaux, quoi qu'on en dise, et que si tout le monde part des mêmes bases (comme dans la vie -ah. ah. ah [excusez-moi, c'est nerveux]), les écarts se creusent vite, ne serait-ce qu'entre ceux qui écriront correctement et les autres, qu'ils massacrent consciencieusement leur langue maternelle de façon préméditée ou non.
Nous aurons donc des personnes qui, protégées par l'anonymat s'autoriseront toutes les bassesses sans craindre de quelconques représailles (dommageables à leur encontre de façon directe tout du moins). Cela aura pour conséquence de semer un chaos assez inimaginable en cas de non-modération des discussions, sur des sujets sensibles.

Ensuite, il y a la différence de niveau entre les protagonistes, évoquée ci-dessus. Il faut savoir qu'il n'existe pas de formule aussi simple que "discussion avec des gens stupides = improductive et discussion avec des personnes intelligentes = formidablement instructive". Il serait pourtant assez simple de le croire, mais ce n'est tout simplement pas toujours le cas.
Il est certain que la plupart des fauteurs de troubles ne feront pas preuve d'une intelligence hors du commun, cependant, les personnes calées dans un sujet particulier (en rapport avec le débat) ou simplement avantagées au niveau de leurs connaissances de la rhétorique se comporteront assez souvent comme, il faut dire ce qui est, des sales cons basiquement bornés persuadés de détenir l'éternelle lumière qui illuminera à jamais les âmes des pauvres pêcheurs ayant osés se mettre en travers de leur chemin (béni soit-il pour l'éternité) quand ils auront réalisé l'erreur qui est la leur de ne pas approuver chacune de leur plus petite affirmation. Je sais, c'est triste, mais c'est là toute l'expression de la vanité humaine. Au lieu de partager leur savoir, les participants se pensant dans leur droit s'armeront de leurs enclumes stylistiques et entreprendront d'en écraser le plus systématiquement possible toute forme d'opposition.
Nous retrouverons donc d'un côté des abrutis limités aux arguments inexistants déversant des flots d'insultes et d'inepties et de l'autre des crétins savants déversant des flots d'inepties et d'insultes bien tournées, et c'est là toute la différence ô combien fondamentalement  justifiable qui rend toute leur démarche autrement plus noble que celui du péquenot de base. C'est l'évidence même.

N'oublions pas le mauvais esprit viscéral d'un grand nombre de personnes, ceux-là même qui acquièrent le doux surnom de troll et qu'on ne présente plus tant on connait leurs manifestations diverses et follement réjouissantes sur moult forums et sites web. Débiter des "évidences" apparentes est leur credo, sans oublier toutefois de faire en sorte qu'elles soient erronées et entraînent des réponses enflammées de la part de ceux qui s'abaisseront à entrer dans leur jeu.

Restent alors les personnes qui n'appartiennent à aucune de ces catégories (ou dérivés quelconques, ne chipotons pas). Elles produiront en général des débats plats, sans intérêt, ou personne ne se mouille et où tout le monde a raison. Cette ambiance de congrès du MODEM est généralement ennuyeuse à mourir et ferait presque regretter les flamewars inconstructives, mais largement plus divertissantes de nos amis évoqués dans le paragraphe précédent. (un troll s'est caché dans la troisième ligne).

Au final il n'y a que très peu de débats où l'on ne retrouvera aucune des caractéristiques évoquées dans cet article, ou alors sur des sujets intéressant environ 200 personnes sur la planète.

Vendredi 28 mars 2008 à 1:26

L'être humain est par nature méprisable, car déséquilibré. De ce fait il court à sa destruction, car c'est là la conséquence la plus basique du déséquilibre en général: l'effondrement.

C'est pourquoi toute personne sensée ayant saisi ne serait-ce qu'une partie de ce que tout cela implique se doit au moins par instants de haïr cette espèce à laquelle elle appartient sans lui chercher d'excuses. Pourquoi en chercher lorsque l'ont sait qu'il n'y en a, quoi qu'on en dise, pas de valable, si ce n'est une sombre hypertrophie d'une sorte d'instinct de survie primal qui se serait mué avec le temps en un instinct de destruction conscient et inconscient à l'encontre de tout ce qui pourrait opposer une résistance à son hégémonie sur l'ensemble du règne animal, végétal et minéral, puisque rien n'est décidément trop beau pour le singe évolué dont nous sommes tous les frères?

Il n'y a donc pas d'excuses, ce moteur qui nous pousse vers le néant est l'exact inverse de ce qu'il prône. Nous cherchons à toujours nous éloigner de nos bases, à évoluer de plus en plus, en étant motivés en cela par ce qu'il y a de plus animal en nous, cette facette de ce que nous sommes que nous tentons à tout prix d'effacer, l'instinct incontrôlable, le ça, appelons-le comme bon nous semble, l'important est de le définir un tant soit peu.

Et faudrait-il des exemples que je pourrais vous en donner, dans divers domaines:

    • L'Homme évolué se doit d'être pacifique. C'est pourquoi il doit se donner les moyens d'anéantir plusieurs fois l'ensemble de la planète en cas de conflit majeur. Il est vrai que cela solutionnera tous les problèmes de guerres, j'en ai bien peur.

    • L'Homme évolué se doit d'être civilisé, c'est pourquoi il crée des lois et des moyens de répressions pour lutter contre toutes les perversions qui le caractérisent, qu'elles soient d'ordre moral ou sexuel. Ces mêmes perversions ne faisant que s'accroître en barbarie et en diversité à mesure que la civilisation avance. C'est beau le progrès.

    • L'Homme évolué doit être maître des éléments, c'est pourquoi il s'est créé des outils grâce auxquels il peut non seulement modifier son environnement mais aussi admirer avec une précision jamais vue jusqu'alors les désastres que cela engendre. Vous reprendrez bien des glaçons dans votre verre? On va justement vous montrer une vidéo de la banquise qui se délite.

    • L'Homme évolué doit se distinguer des animaux, c'est pourquoi il a décidé de ne plus effectuer de sélection sur des critères purement génétiques, cherchant à garantir la pérennité de l'espèce en choisissant ses partenaire selon des traits et caractéristiques (physiques) qui auraient permis à l'espèce de s'améliorer. Cela dit, cela ne l'empêchera pas de vouloir créer des être parfaits, mais en sélectionnant les gènes en laboratoire. Il ne faut pas déconner, on n'est pas des bêtes.


La liste est longue et aussi désolante qu'un paysage de pâturages au Sahel. Et ce sont ce genre de choses qui me font dire qu'il faut haïr ce que nous sommes par moments. Parce que cela nous rend lucides.

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